ainsi que l’Ambassadeur-Chef de la délégation de l’Union européenne et le Directeur de l’Agence Française de Développement, ont animé le vendredi 24 novembre 2017 une conférence débat sur le thème :« Perspectives économiques en Afrique Subsaharienne : croissance, ajustement budgétaire et diversification».
M. JEAN-CLAUDE NACHEGA, représentant résident du Fonds Monétaire International au Tchad par ailleurs Président du comité des Partenaires Techniques et Financiers du Tchad, Monsieur François NANKOBOGO, Représentant résident de la Banque mondiale, Madame Denisa-Elena IONETE, Ambassadeur, Chef de Délégation de l'Union européenne et Monsieur François TIROT , Directeur de l’AFD au Tchad ont tour à tour expliqué les perspectives économiques de l’Afrique subsaharienne.
Selon les conférenciers: Le ralentissement de l’activité économique qui a touché la majeure partie de l’Afrique subsaharienne s’atténue, mais la situation de la région reste fondamentalement difficile. Le taux de croissance devrait atteindre 2,6 % en 2017, mais ce rebond s’explique principalement par des facteurs ponctuels, notamment le redressement de la production pétrolière au Nigéria et l’atténuation de la sécheresse en Afrique orientale et australe, et par une amélioration relative de la conjoncture extérieure. Même avec cette embellie, la croissance dépassera à peine le taux décroissance démographique. Un tiers des pays de la région continuent d’enregistrer des taux d’au moins 5 %, mais dans 12 pays de la région, qui abritent plus de 40 % de sa population, le revenu par habitant devrait diminuer. En 2018, la croissance devrait continuer de se redresser et atteindre 3,4 %, mais les incertitudes qui entourent actuellement la politique économique au Nigéria et en Afrique du Sud freinent son élan, et elle ne devrait pas progresser davantage en 2019. Dans beaucoup de pays qui connaissent une expansion plus rapide, la croissance continue d’être tributaire des dépenses publiques, ce qui alourdit la dette et son service.
LA CONJONCTURE EXTERIEURE S’AMELIORE, MAIS LA REPRISE RESTE MODESTE ET LES VULNERABILITES S’ACCENTUENT.
• La vigueur accrue de la croissance mondiale, notamment dans les principaux partenaires commerciaux que sont la Chine et la zone euro, donne une impulsion positive à l’activité en Afrique subsaharienne. En outre, le regain d’appétit pour le rendement a entraîné un rebond des émissions obligataires souveraines dans les pays pré-émergents de la région. Cependant, la faiblesse des cours des matières premières continue de peser sur les perspectives de croissance pour les pays exportateurs de produits de base.
• La dette publique en pourcentage du PIB s’est accrue depuis 2013 et est désormais proche de 50 %
dans près de la moitié des pays de la région. Le nombre de pays à faible revenu surendettés ou risquant de le devenir est passé de 7 en 2013 à 12 en 2016, et tous les pays pré-émergents de la région et les autres pays ayant une notation de crédit, à l’exception de la Namibie, ont vu leur notation descendre en dessous de la catégorie «investissement». L’alourdissement de la dette s’explique par le creusement des déficits budgétaires, la faiblesse de la croissance, la chute des cours des produits de base et les dépréciations de taux d'échange dans certains pays.
Les soldes des transactions courantes se sont certes améliorés et les tensions se sont quelque peu estompées sur les marchés des changes, mais les réserves internationales sont inférieures aux niveaux jugés adéquats dans de nombreux pays.
EN RAISON DE CETTE ACCUMULATION DE VULNERABILITES, LES RISQUES BAISSIERS PREDOMINENT.
Les retards dans la mise en œuvre des ajustements risquent de réduire l’espace budgétaire nécessaire à des dépenses favorables à la croissance, d’évincer le secteur privé et d’avoir un effet négatif sur le secteur extérieur. La montée des niveaux d’endettement public suscite des doutes
quant à la viabilité de la dette de la région, tandis que l’intensification du lien entre les banques et ’État pourrait ébranler davantage le secteur financier. Plusieurs pays se heurtent en outre aux risques liés au retrait des relations de correspondance bancaire.
Dans ce contexte, la mise en oeuvre de l’assainissement budgétaire envisagé par de nombreux pays et l’exécution des réformes structurelles visant à corriger les contraintes à la croissance sont une priorité absolue.
L’assainissement budgétaire est le plus nécessaire et le plus urgent dans les pays exportateurs de pétrole.
Dans certains cas (en Angola, par exemple), un ajustement considérable a déjà été effectué, principalement sous la forme d’une réduction des dépenses en capital. Ces pays devraient chercher avant tout à accroître leurs recettes hors produits de base et à réduire leurs dépenses récurrentes de façon ciblée. Toutefois, lorsque l’assainissement est urgent, notamment dans les pays exportateurs de pétrole, la réduction des dépenses publiques d’investissement risque d’être inévitable.
Les autres pays doivent aussi engager un assainissement budgétaire, certes dans une moindre mesure, en se centrant sur la composition et l’efficience des dépenses. Les pays d’Afrique subsaharienne doivent aussi mener des réformes structurelles et saisir les occasions de pousser la croissance au-delà des projections actuelles, en agissant sur le front de la transformation structurelle et de la diversification des exportations, y compris en améliorant l’accès au crédit, les infrastructures et le cadre réglementaire et en mettant en valeur la main-d’oeuvre qualifiée.
L’IMPACT DE L’ASSAINISSEMENT BUDGÉTAIRE SUR LA CROISSANCE EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE
Le deuxième chapitre examine les effets sur la production des variations des dépenses et des recettes publiques dans les pays d’Afrique subsaharienne pendant la période 1990–2016.
Les épisodes passés d’assainissement budgétaire — définis comme les périodes durant lesquelles la situation budgétaire s’est améliorée à partir de la réduction des dépenses ou de la mobilisation de recettes hors produits de base — ont généralement été liés à des effets négatifs sur la production.
Les effets estimés des variations de la politique budgétaire sur la production — les multiplicateurs budgétaires— sont généralement plus faibles que ceux observés dans les pays avancés
ou les pays émergents. En moyenne, les assainissements qui, en Afrique subsaharienne, reposaient sur une réduction de l’investissement public ont eu l’effet de contraction le plus marqué
sur la croissance. Ceux basés sur des compressions de dépenses courantes ou sur la mobilisation de recettes ont eu un moindre effet sur la production. Cependant, l’impact dépend dans une large mesure des particularités du pays, de l’accompagnement que peuvent exercer les politiques mises en oeuvre, de l’efficience des dépenses et de la solidité des institutions. Il ressort de ces conclusions que les pays de la région devraient se centrer sur la mobilisation de recettes pour atténuer les retombées négatives de l’assainissement sur la croissance.
Cependant, comme la mobilisation de recettes prend un certain temps, les réductions de dépenses risquent d’être inévitables, notamment dans les pays où il est urgent d’opérer des ajustements. Dans ces cas-là, il importe de protéger les dépenses dans les infrastructures essentielles, de manière à ne pas compromettre trop les perspectives de croissance future, et d’accorder la priorité aux dépenses en santé et en éducation et aux dispositifs de protection sociale afin de réduire dans toute la mesure du possible les effets sur les ménages
plus démunis.
DIVERSIFICATION ÉCONOMIQUE DE L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE
Le troisième chapitre fait le point des progrès accomplis en Afrique subsaharienne en matière de diversification économique. Le tableau n’est pas uniforme. Au niveau global, la transformation structurelle a été plus lente que dans d’autres régions. Malgré tout, il s’est produit un redéploiement de la main-d’oeuvre depuis un secteur agricole à faible productivité vers des emplois à haute productivité dans l’industrie manufacturière et les services, ce qui a contribué à une progression globale de la productivité. De plus, certains pays de la région, riches en ressources naturelles ou pauvres en ressources naturelles, ont diversifié leurs exportations à un rythme comparable à celui de leurs homologues dans le reste du monde. En revanche, les exportateurs de pétrole de la région ont affiché une spécialisation grandissante, qui s’explique par la montée des cours et les nouvelles mises en production. Il existe une corrélation positive entre d’une part la transformation structurelle et la diversification des exportations, et d’autre part la croissance, notamment aux stades initiaux de développement. Les régressions portant sur plusieurs pays indiquent que la stabilité macroéconomique, l’accès au crédit, de bonnes infrastructures, un cadre réglementaire propice, une main-d’œuvre qualifiée et l’égalité sont autant de facteurs liés à une plus grande diversification économique. L’étude des différents pays met en lumière l’hétérogénéité des expériences de croissance. Les interventions réussies ont cela de commun qu’elles mettent en valeur les ressources dont est doté le pays et développent ses capacités sous-jacentes. La correction des défaillances du marché peut être utile, au même titre que l’intégration commerciale.